Excès et mensonges de la communication électorale en Aïkido, le grand ras le bol
Publié le 30 Septembre 2024
L’Aïkido est souvent divisé entre deux familles de pratiquants. Ceux qui attendent les élections fédérales pour communiquer et ceux qui s’en foutent. En 2024, force est de constater que nous avons atteint le point de non-retour entre les partisans de la technocratie de l’Aïkido et la presque totalité des pratiquants.
Vous ne savez pas de quoi je parle ?
C’est normal. Une tempête microscopique dans le verre à cognac de l’Aïkido fédéral est en train d’éclater et tous les pratiquants, qu’ils soient concernés ou non, assistent à ce triste spectacle sans savoir pourquoi tel ou tel aspect de la vie fédérale se met soudain à passionner nos dirigeants ou des spécialistes de la technostructure qu’est devenu l’Aïkido Français au point de nous inviter sans consentement à de procès staliniens, à la lecture de communications hebdomadaires inutiles sur des réalisations périmées ou pire, à des règlements de comptes.
Je m’explique :
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L’olympiade fédérale : une longue traversée du désert :
Comme tous les débutants, je n’étais pas particulièrement intéressé par la politique dans l’Aïkido. On peut même dire que je suis longtemps resté « sans étiquette » sur ce sujet comme la majorité des pratiquants et des enseignants de notre discipline. Tout ceci me paraissait très éloigné de la pratique.
En 12 ans, j’ai vu toutefois la qualité de l’Aïkido fédéral, sa pertinence, son engagement au service des pratiquants, faire des pas de géants puis de (très) longues ellipses. J’ai vu des trous noirs et de grandes envolées. J’ai lu tout et le contraire de tout. Je n’ai compris toutefois la raison que bien plus tard, il s’agit du syndrome de l’olympiade fédérale.
Ami pratiquant, si tu ne connais pas l’olympiade fédérale, c’est normal. Il s’agit du moment où nos instances dirigeantes sont renouvelées pour 4 ans. Nous allons élire notre comité directeur qui lui-même élira son président. C’est un peu comme une élection présidentielle là où les élections des comités directeurs de ligue sont les élections locales.
L’olympiade fédérale, c’est donc le moment où le petit monde de l’Aïkido fédéral se souvient qu’il est en déclin et décide d’un battle royal général. C’est pour cela que vous êtes abreuvés désormais quotidiennement d’appels à l’action ou de contenus abscons. C’est pour cela qu’après des semaines d’autosatisfecit de la part de gens qui devraient se terrer dans des trous de hobbits, je dois sortir un peu de mon dojo pour me fendre d’un article que j’espère d’utilité publique puisque nous arrivons en dernière ligne droite de tout ce capharnaüm.
Le syndrome de l’Olympiade fédérale, cher lecteur, c’est un peu comme ce que vous détestez dans la vie politique Française. Des gens ultra spécialisés dans des domaines aux antipodes de vos préoccupations qui viennent vous donner des leçons, vous proposer des solutions qu’ils ne mettront peu ou pas en œuvre, vous parler des "valeurs" qu'ils sont incapables de respecter dans une conversation sur les réseaux et vous expliquer enfin qu’il faut (encore) continuer 4 ans de plus pour tout ce que vous ne voulez pas.
Sans doute avez-vous mal compris. Sans doute ne comprenez pas que l’Aïkido doit « évoluer ». Sans doute êtes-vous un défenseur du passé. Sans doute êtes vous complotiste. Sans doute avez-vous mal vu.
Cela se voit d’ailleurs.
Tellement que mon camarade de Paresse Martiale et moi-même alertons depuis plus de 3 Olympiades de la chute vertigineuse de nos effectifs avant et après le covid.
Nous n’avons pas attendu les derniers mois pour vous expliciter des solutions, des réflexions, des statistiques, des inquiétudes. On fait tout ça intensément depuis au moins 2017. Nous n’attendons pas le dernier moment d’une élection pour communiquer un bilan car ce bilan, vous pouvez tous le voir dans vos dojos respectifs. Il s’agit du nombre de pratiquants sur vos tapis et de ce que la fédération a fait pour vous aider à développer votre club.
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Le prix élevé de la survie :
Comme tous les débutants, je n’ai pas souhaité adhérer à une ligne nationale parce que je n’y voyais pas grand-chose d’utile et depuis 2013 je souhaite être utile aux débutants. J’ai pourtant tenté l’aventure du Collectif Irimi au niveau local, j’ai pourtant alerté à titre personnel dans la mesure de mes moyens sur la faiblesse de nos contenus fédéraux. J’ai pourtant créé un club pour mon enseignante, et sans même un premier dan en poche et absolument aucune aide fédérale, que j’ai présidé 4 ans avant de passer la main car oui, nous devons avoir le sens du service et 4 ans me paraissent bien suffisants.
J’ai compris que le prix élevé de la survie dans l’Aïkido fédéral était de fermer sa gueule et de pratiquer.
Aujourd’hui, je suis toujours dans un bureau de club en tant qu’assistant et je me consacre entièrement à la promotion de notre structure et aux progrès de la section enfant que je co-anime sérieusement. C’est je crois, seule chose essentielle dont j’aimerai mieux discuter.
En quoi ces élections fédérales sont-elles donc différentes des autres me suis-je demandé ? Est-il vraiment utile de me positionner alors que tant d’autres gradés se contentent d’attendre de voir et d’applaudir pendant que les élus vont venir nous abreuver des valeurs de l’Aïkido comme si nous étions une immense succursale ou une enseigne de fast-food.
Comme j’ai la chance d’être aussi un professionnel du droit, j’ai toutefois compris que cette année, c’était bien différent. Dès 2023, il était devenu évident que le calendrier du législateur deviendrait incompatible avec notre situation Française atypique à savoir deux fédérations Françaises évoluant dans une coquille quasi vide, l’union des fédérations d’Aïkido qui est une fédération fantôme. Comprenez bien chers lecteurs, cette entité était la seule chose qui permettait à nos pratiquants d’obtenir des grades validés par l’état Français (et permettant de s’en prévaloir sur sol) à travers la fameuse CSDGE.
Dans la mesure où les lois récentes modifient désormais les conditions d’octroi des agréments, nos agréments actuels vont cesser d’exister à compter du 31 décembre 2024. Il n’est pas alors inepte de s’interroger sur le fait de savoir ce qu’il va se passer si au mois de janvier 2025, nos fédérations actuelles sont une nouvelle fois (car oui, les tentatives de fusion de fédération d’Aïkido, c’est comme la madeleine, mais périmée, de Proust) sommées de par la loi de fonctionner autrement.
Quelle ne fut pas ma surprise de voir que la gouvernance de la FFAAA, fédération à laquelle j’appartiens, communique ENFIN sur ce sujet...quelques semaines avant les élections mais sans aucune prespective. Est-ce surprenant que la FFAB, également impactée, n’en parle absolument pas publiquement à ses pratiquants ?
Que comprendre de ces gouvernances qui se fendent de communiqués lunaires uniquement dans le cadre des élections (et encore) sur fond de querelle de clocher ? Tombez vous de l’armoire à l’automne 2024 ? Découvrez-vous ce sujet ? Quelles sont nos perspectives mise à part le traditionnel « ne vous inquiétez pas » ? Pour ma part, je n’en vois qu’une seule.
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Pourquoi je reste (encore) à la FFAAA :
Comme beaucoup, j’ai le souvenir de cet article de mon ami Léo Tamaki du 30 décembre 2012 intitulé « Pourquoi je quitte la FFAB ». Je me souviens de ces mots bien des années plus tard et ils resonnent plus âprement maintenant que je m’efforce tous les jours d’être enseignant d’Aïkido : « Il arrive dans la vie de tout adepte qui enseigne, un moment où il lui faut prendre la décision de la façon dont il souhaite transmettre, et de la structure qui le lui permettra ».
Je crois que je suis arrivé à ce moment cher Léo.
C’est donc pour cette raison que je souhaite la survie de la pratique au cœur d’une certaine FFAAA parce qu’à travers elle se trouve son cœur battant, c’est-à-dire ses enseignants phares. Je veux parler de Christian Tissier. Je veux parler de Bernard Palmier. Je veux parler de Franck Noel. Je veux parler de leurs élèves et d’une belle partie de ces deux générations qui suivent intensément les traces laissées par Seigo Yamaguchi à quelques Français.
Je ne veux pas que ma pratique devienne politiquement correcte, inclusive, éthique ou affublée de tous les mots et les néologismes militants ou mercantiles de notre société malade qui ne reflètent jamais la réalité des problèmes des gens. Je veux que la pratique reste la pratique. Je veux simplement que l’Aïkido de Seigo Yamaguchi continue de vivre sa vie sans être pollué par l’air du temps qui n’a rien à faire sur un tapis là où le seul arbitre, le seul juge de paix, devrait être votre niveau si vous êtes pratiquant et la qualité de votre enseignement si vous êtes professeur. Les considérations politiques dans l’Aïkido ne sont que l’écume, des scories qui peuvent parfois colorer certaines organisations mais doivent jamais en devenir le moteur au risque d’en détruire le sens.
Je ne veux pas être le petit arbitre progressiste de technocrates, même si parfois ce qu’on veut bien définir comme le progrès peut avoir du bon. Même si je suis parfois d’accord avec vous en dehors du tapis, je ne veux pas être celui qui jugera sur le tapis mon camarade de pratique autrement que par le talent et le mérite.
Il est donc temps, je le pense, de revenir aux fondamentaux de notre organisation. A savoir ce qui a fait d’elle une organisation connue et reconnue dans le monde entier : c’est-à-dire des enseignants de haut niveau qui transmettent. Il est temps (enfin) de les écouter, même s’ils ne sont pas parfaits (loin de là), même s’ils ne connaissent pas tous parfaitement les acronymes, les unités de compétences et les rouages ministériels. Qu’avez-vous à faire de ces compétences si elles ne sont pas au service des hommes et des femmes qui font notre Aïkido ? Auriez-vous envie demain de rester à la FFAAA si l’Aïkido de Seigo Yamaguchi n’existait plus mais si nous obtenions en retour de magnifiques BP JEPS ou CQP MAM ou que sais-je encore ? Je ne le pense pas.
Il est également temps de revenir au plus petit dénominateur commun : à savoir le débutant. Ce dernier a besoin d’une relation maitre-élève qui fera autre chose de lui qu’un consommateur béat, friand de valeur mais incapable de rien et surtout pas de transmettre la rigueur de notre discipline. Ceux qui vous disent que c’est dépassé, démodé, has-been, ou une oppression systématique sont dans des impasses idéologiques. J’ajoute qu’être au service d’un débutant en Aïkido, ce n’est pas lui donner non plus des postes alors qu’il n’est pas compétent pour exercer. Ce n’est pas le propulser dans des comités ou des collèges techniques pour remplir les cases inclusives du législateur ou lui donner une impression de démocratie. Ce n’est pas non plus segmenter ou compartimenter son statut y compris par le genre. Tout comme j’avais été l’un des premiers à parler dès 2014 d’Aïkido au féminin, je serai visiblement (c’est incroyable) le premier à vous annoncer que la discrimination positive reste de la discrimination et ne rendra pas service aux pratiquantes, à fortiori celles qui ont encore besoin de progresser auprès d’un enseignant qu’il soit homme ou femme. Si vous l'ignorez encore il va falloir atterrir. Nous ne ferons qu’abaisser le niveau de pratique comme dans l’enseignement supérieur Français et International, où la discrimination positive gangrène les plus prestigieuses universités du monde en tirant le niveau à la baisse pour tous.
Quand aux enseignantes qui sont déjà au top de notre discipline, pourquoi ne pas les nommer immédiatement à des postes nationaux pour commencer ? Pourquoi avoir attendu deux mandats pour étoffer les postes de DFR ou le CTN d’enseignantes de qualité que nous possédons déjà ? Pourquoi pas dès 2023 au moment où les exigences ministérielles se sont fait sentir ? Sont-elles obligées de finir dans des cases réservées aux femmes du fait d’un contexte électoral ? Je ne le crois pas. Revenons à la base ce qui fait notre essence : un maitre (oui, un maitre), un élève, une rencontre, la pratique. Rien de plus, rien de moins. Le cadre autour doit être facilitateur et non limitant.
Dans la mesure où nous ne savons même pas où nous allons demain, altérer nos fondamentaux est un projet vain. De même, il serait fou ou extrêmement présomptueux de tourner le dos à l’immense majorité des gradés de notre fédération lorsqu’ils expriment (enfin) quelque chose.
Ce quelque chose, j’y souscris également en appelant à la responsabilité de l’alternance de plus bas de l’échelle où je me trouve puisqu’il se trouve bien peu de grands pour en faire autant en ayant l’audace d’expliciter et d’expliquer la nature de leur choix. Dans cet excès de communication, j’aurai bien voulu entendre d’autres voix explicitant également leur volonté afin que tout le monde puisse juger projet contre projet.
Faites le vôtre en toute responsabilité. Il est minuit pour le quart pour l’Aïkido fédéral.